C’est un numéro un peu spécial. Un peu plus tourné vers notre cœur de vie niçoise, un peu plus épais aussi puisque nous avons décidé de ne pas paraître au mois de septembre. Face au drame qui a endeuillé Nice nous avons préféré attendre que l’émotion ne retombe. Les traces de ce 14 juillet tragique restent vives dans les esprits quand les mots tentent d’apaiser le sentiment d’injustice et d’absurdité… « Il y a parfois dans les blessures une lumière qui éclaire le chemin des possibles » écrit le syrien Khaled Youssef dans un magnifique texte sur cette nuit vécue sous le signe de la solidarité.

Ce numéro d’hiver est donc une ode à notre ville. Un hommage à son histoire dans une déambulation poétique, une plongée dans le cosmopolitisme de Nice. Autrefois surnommée Babazouk, de l’expression arabe Al Babazouk signifiant la « porte du souk », la vieille ville accueillait les produits venus de tous les pays de la Méditerranée. Dans ce temps où pirates et barbaresques sillonnaient les mers, on parlait cette langue du voyage, sorte d’esperanto propre aux marins et aux commerçants…

Aujourd’hui nous voulons parler un seul esperanto, celui de l’amour comme fil conducteur qui relie les portraits de ce 29ème numéro. L’amour de Gil Gamatte et Pierre-Antoine Bianchini pour la céramique des années 50 qui les a conduit à réunir une collection viscérale, décalée et néanmoins pharaonique de plus de 3500 pièces dans un musée du Kitsch à Vallauris. L’amour du vin et des hommes du sommelier Franck Thomas qui lui a permis d’élaborer une approche intuitive, totalement nouvelle, de la dégustation. L’amour de Noëlle Perna pour sa ville d’adoption où elle nous entraine avec son empathie pour ses habitants qu’elle croque avec un humour gourmand. L’amour pour la bière qui a donné à Olivier Cautain l’impulsion nécessaire pour créer la première brasserie artisanale de la ville, une bière 100% niçoise matinée de pois chiche. L’amour de Jean-Philippe Dubois pour le roi des jeux qui a propulsé le club d’échecs de Nice à la cinquième place du Top 12 et qui permet au Club de venir en aide aux jeunes les plus défavorisés. L’amour de Nicole Caligaris pour la littérature enfin, seule manière pour l’auteure d’essayer d’examiner un acte effroyable et d’écrire dans le chaos même… Ce sont ces petites poussières d’humanité qui nous font avancer et croire en nous. Bonne lecture !

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